vendredi 8 février 2008

Zafer

La journée du jeudi 7 février aura été marquée par l'émotion au fur et à mesure de la lecture du verdict qui déboutait l'un après l'autre les arguments fallacieux, les soit-disantes preuves, et pour le dire plus clairement, les mensonges du procureur fédéral Johan Delmulle. La justice belge a épousé à 99% le point de vue de la défense et des prévenus. On aurait pas pu imaginer meilleur scénario dans l'issue du dit « procès du DHKP-C » bien qu'il faille reconnaître qu'il était complètement ouvert et que le pessimisme était aussi de mise, surtout par rapport à la manière dont il avait débuté. Les deux mois d'attente et l'échéance sans cesse répoussée de la sentence n'auront donc pas été vains mais il aura quand même fallu 2 ans, quasi jour pour jour, de combat acharné et moult péripéties pour en arriver là.

Voici le journal télévisé de la RTBF relatant ce verdict dans l'édition de 19h30 de ce jeudi :




La presse turque enrage

Un autre bon signe de l'issue du « procès du DHKP-C » est l'incompréhension totale lisible dans la presse turque acquise au nationalisme d'État. Il faut dire que le dégoût pouvait déjà se lire sur le visage des journalistes des agences de presse turque présents au tribunal d'Anvers ; des journalistes usuellement plus habitués à respecter une courtoisie hypocrite envers les prévenus mais qui n'en pensent pas moins.

Ainsi le journal en ligne BelTürk, dont la fonction principale consiste à entretenir un nationalisme rampant au sein de la communauté turque expatriée, titre : "La justice belge a surpris de nouveau". La presse belge aurait parlé "d'histoire mensongère" mais l'article se garde bien de révéler lesquelles.

Le canard de Yusuf Cinal, spécialiste ès fausses interview comme l'avait révélé Mehmet Köksal, YeniHaber, parle des applaudissements des "partisans de l'organisation terroriste" à la fin du verdict relativement à la réaction du public de la salle. Il montre les mêmes surprises que son concurrent mais en inventant pour la forme la consternation de la communauté turque de Belgique, probablement peu au courant de la date du procès.

Le quotidien nationaliste Hürriyet fait part de la réaction du ministère turc des Affaires étrangères, pas du tout content, évidemment. Une très classique ingérence turque dans la justice hors frontières, surtout quand il s'agit d'enfoncer ceux qui critiquent la politique d'État. Le mot "terroriste" apparaît en tout sept fois dans l'article, titre inclus. On ne tient peut-être pas le record sur une grandeur de deux petits paragraphes mais la jauge "lavage de cerveau" affiche quand même un beau score.

Milliyet parle de "comédie de jugement" et a visiblement du mal à avaler le fait que Dursun Karataş, symbole de l'opposition de gauche en Turquie et emprisonné peu après le coup d'État, ait été acquitté. Le journal regrette littéralement qu'il n'y a pas moyen de faire appel de la décision.

Radikal, qui passe souvent pour être le journal le plus progressiste de Turquie (mais qui appartient au même groupe de presse que les deux précédents), se plaint du fait que Fehriye Erdal n'ait reçu que deux ans de prison (non réalisables) et n'en revient toujours pas qu'un tribunal ne puisse considérer le DHKP-C comme une organisation terroriste. Le journal prend aussi acte du fait que l'État turc représenté au tribunal n'a pas pu apporter les preuves du "terrorisme" du DHKP-C.

Dans tous les cas, le fameux argument d'autorité des listes noires est abondamment utilisé. Les listes auraient même valeur de loi à en croire Hürriyet, qui trahit ainsi sa passion du dogme.

Nouvelles d'Italie...

Au même moment, se déroulait l'audience de la Cour d'appel de Sassari, en Sardaigne, concernant la validité de l'extradition requise par la Turquie sur la personne d'Avni Er, militant turc emprisonné. L'Italie est désormais le seul pays qui détient en prison des personnes arrêtées suite à l'opération menée le premier avril 2004 et coordonnée par l'exécutif de plusieurs pays dont la Turquie. Contrairement à la Belgique dont nous venons de connaître l'issue heureuse, l'appel en Italie avait confirmé en janvier dernier les peines prononcées en première instance.

Démonstration de soutien pour Avni Er
Sassari - 7 février (photo : Il Sardegna)

Par rapport à la demande formulée par la Turquie, il semblerait que le ministère publique italien lui-même ait été quelque peu circonspect et qu'il aurait demandé des précisions puisqu'il est compétent pour la formuler devant la cour. Pour l'heure, l'audience a été reportée au 10 avril prochain. Avni Er qui était en grève de la faim a décidé de la suspendre. Toutefois, l'incertitude demeure sur la décision finale et la partie est encore loin d'être gagnée dans ce cas-là même si le soutien politique se fait toujours plus grand et qu'Avni Er peut compter sur la solidarité de l'associatif sarde.

1/2KL


* Zafer signifie victoire en turc

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