vendredi 24 avril 2009

Rendez-leur leur enfance !



Un enfant torturé par un militaire le jour de la fête des enfants en Turquie

A l'occasion du 15e anniversaire de l'ouverture de la Grande assemblée nationale de Turquie, Atatürk, en bon père fondateur, avait dédié l'indépendance de la nation aux enfants en proclamant le 23 avril 1935 "fête des enfants et de la souveraineté nationale". Aujourd'hui, les 4 millions d'enfants qui travaillent dans des conditions insalubres pour survivre ou qui mendient au lieu d'aller à l'école (source: ILO), qui sont soumis à la maltraitance, à la drogue, à l'alcool, aux abus sexuels, à la misère et à l'exil, lui sont sans doute très reconnaissants.

Et que dire de ces millions d'enfants kurdes dont on a volé la langue, le sourire et les rêves ?

Aujourd'hui même, au cours d'une manifestation de protestation contre les rafles policières massives effectuées ces derniers jours dans les rangs du parti DTP (pro-kurde), un enfant kurde de 12 ans dénommé Seyfi Turan a été tabassé à mort à Hakkari par un membre des forces spéciales, à coups de crosse de mitraillette.

L'enfant a été transporté aux urgences de l'hôpital universitaire de Van. Il est dans le coma.

On se rappellera qu'en janvier dernier, M. Erdogan avait fustigé l'opération contre Gaza durant le sommet de Davos en présence de Shimon Peres. Son show avait fait un tabac et nombreux sont ceux qui avaient vu en lui un grand humaniste.

Depuis, on ne compte plus le nombre d'enfants kurdes tabassés, arrêtés ou massacrés par les forces de sécurité turques.

Actuellement, des centaines d'enfants kurdes qui ont manifesté contre les opérations terroristes de l'Etat turc peuplent les prisons.

Rendre leur enfance aux enfants le jour des enfants, est-ce trop demander ?


Pour voir les images atroces de l'enfant kurde battu à mort par le militaire turc:
http://www.youtube.com/watch?v=IEMuwkETXuU

Le 23 avril 2009
Bahar Kimyongür

mercredi 22 avril 2009

Avril, un mois difficile pour la gauche en Mer Noire


Photo : Les 5 victimes de lynchage à Trabzon (avril 2005)


Le 6 avril 2005, Zeynep Erdugrul, Cetin Güven et trois autres jeunes militants avaient été lynchés par une meute de plus de 2.000 personnes galvanisées par des provocateurs agissant pour le compte de la sûreté turque et ce, alors qu’ils distribuaient un tract de l’association d’entraide avec les familles de détenus (TAYAD) dénonçant les conditions inhumaines de détention dans les tristement célèbres pénitenciers cellulaires de type F. La rumeur selon laquelle ils étaient des terroristes, des séparatistes kurdes et des assassins de policiers se répandit comme une traînée de poudre, entraînant la folie furieuse de milliers d’habitants de la ville septentrionale de Trabzon.

Ces cinq jeunes activistes de gauche avaient ensuite été embarqués manu militari dans un véhicule blindé par des policiers qui voulaient prétendument les « sauver de la vindicte populaire ».

La violence et la lâcheté de la foule suscitèrent l’indignation de la société turque tandis que les victimes elles, à peine sorties de leur garde à vue, loin de se décourager, allèrent à la rencontre de leurs agresseurs pour les admonester et exiger des excuses. Leur patience porta ses fruits puisque non seulement, ils gagnèrent la confiance et le respect de nombre de leurs ex-lyncheurs, mais en plus, leur journal intitulé « Özgür Karadeniz’in Sesi » (La voix de la Mer Noire libre), pourtant résolument de gauche, devint très vite l’une des gazettes locales les plus lues dans la région.

Face à l’étonnante perméabilité de la population du littoral pontique à l’égard du message politique porté par une poignée de militants dans une région aussi hostile, gangrenée par le nationalisme, le fondamentalisme religieux et le racisme les plus acerbes, une région soumise depuis près d’un siècle à une intense campagne anti-chrétienne, anti-grecque, anti-arménienne et anticommuniste de la part du pouvoir central (puis anti-kurde à partir des années 1990, avec l’intensification de la lutte de libération nationale kurde), les membres de la sûreté turque avait toutes les raisons d’ourdir de nouvelles ruses.

Dans les régions de la Mer Noire, on est pourtant loin de la création du Soviet de Fatsa [*] et Fikri le Tisserand (Fikri Sönmez) son maire rebelle des années 70 est mort depuis bien longtemps dans les geôles du général Evren.

Néanmoins, le 11 avril dernier, la police opéra une vaste opération antiterroriste visant des milieux soi-disant proches du DHKP-C (Parti-Front révolutionnaire de libération du peuple) à Trabzon, Rize et Istanbul. Trois jours plus tard, la 2e Cour d’assises d’Erzurum a émis un mandat d’arrêt contre 9 des personnes interpellées sous l’accusation de porter assistance à l’organisation marxiste clandestine.

Or, les policiers n’ont saisi chez ces militants que des livres et des journaux dissidents. Parmi les victimes de cette énième intimidation policière, on retrouve Zeynep Erdugrul, aujourd’hui âgée de 28 ans et Cetin Güven (30 ans) mais aussi quatre étudiants de l’Université technique de la Mer Noire. Les 9 militants de gauche se trouvent actuellement à la prison d’Erzurum.


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[*] Le 12 juillet 1980, le gouvernement Demirel envoya les blindés sur la petite ville de Fatsa qui connut la première expérience de démocratie participative grâce à l’action de la gauche radicale et de Fikri Sönmez, son maire, membre de Devrimci Yol (le Sentier révolutionnaire). A l’issue de cette opération militaire (baptisée « Nokta », c’est-à-dire « Le Point ») préludant au coup d’Etat du 12 septembre 1980, 300 personnes furent arrêtées dont le maire de la ville. Ce dernier mourut le 5 mai 1985 en prison sous la torture.

mardi 7 avril 2009

Liberté pour Ilker et Sefik

Le Comité français des libertés vient de publier un appel à la solidarité avec les détenus politiques d'origine turque Ilker ALCAN et Sefik SARIKAYA. Tous deux paient chèrement le prix de leur engagement en faveur d'une Turquie indépendante, démocratique et socialiste. Ilker ALCAN est un journaliste issu de la prestigieuse université de Galatasaray. Il passa de nombreuses années dans les prisons turques et survécut aux plus atroces tortures. Sa soeur Nilufer Alcan elle, périt avec 5 autres prisonnières dans les flammes boutées à leur dortoir de la prison de Bayrampasa par les militaires, durant l'assaut sanglant du 19 décembre 2000, une opération destinée à déporter les détenus politiques vers les prisons cellulaires de type F. Militant politique infatigable aux origines turques et arméniennes, Sefik Sarikaya est connu et respecté dans l'émigration anatolienne pour sa générosité et son humilité. Il a passé près de dix ans dans les prisons françaises pour son appartenance au DHKP-C dans une précédente affaire politico-judiciaire.

N'hésitons pas à leur écrire.

Ilker ALCAN
N° 367 643 D4
Maison d'Arrêt de Fleury-Merogis
7, Avenue des Peupliers
91705 SAINTE GENEVIEVE DES BOIS / PARIS




Sefik SARIKAYA
N° 289706 Cellule 1/107
Maison d'Arrêt de la Santé
42, Rue de la Santé
75014 PARIS - France



Ilker ALCAN et Sefik SARIKAYA
Jugés en France pour leur opposition au régime fasciste d’Ankara

Le 9 juin et le 20 octobre 2008 à 6h du matin, les commandos de la SDAT (Sous-direction anti-terroriste) firent irruption dans plusieurs domiciles ainsi que dans les locaux de l’Association anatolienne de culture et de solidarité de Paris. Cette intervention policière fut d’une rare violence : portes brisées, appartements saccagés, femmes et enfants plaqués au sol, armes pointées sur les tempes… Au total, 13 personnes ont été mises en garde à vue et en examen. Cible de cette opération: une association culturelle ordinaire ainsi que ses adhérents, qui défendent depuis des années les droits des travailleurs immigrés originaires de Turquie et qui s’opposent au régime fasciste d’Ankara. Tous sont accusés d’association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste.
Mais les véritables chefs d’inculpation sont la tenue de manifestations, de conférences de presse parfaitement légales bénéficiant de l’accord de la préfecture et la vente de l’hebdomadaire Yürüyüs (La Marche), une publication de gauche imprimée et distribuée légalement, même en Turquie.

D’après le juge d’instruction : « les actions qu’ils mènent sont légales, mais servent à soutenir des réseaux clandestins hostiles au régime en Turquie. Par conséquent, leurs actions doivent être considérées comme terroristes et poursuivies en vertu des lois anti-terroristes. »

En réalité, nos camarades sont en prison pour leur opposition au régime fasciste d’Ankara, pour avoir défendu les libertés d’expression et d’association, pour avoir lutté contre des lois et des mesures antidémocratiques, pour avoir soutenu les travailleurs licenciés, les droits des étudiants, en somme, pour avoir défendu les sans-droits, les opprimés et les exploités.
Malgré l’absence de preuves, malgré le fait que les perquisitions n’aient révélé aucune activité illégale, Ilker Alcan et Sefik Sarikaya sont détenus depuis le 9 juin 2008.
Treize autres personnes ont été placées sous contrôle judiciaire avec l’interdiction de quitter le département où ils résident, de rencontrer leurs co-inculpés, de se rendre dans des associations fréquentées par des gens originaires de Turquie, de lire des revues de gauche imprimées en Turquie, mêmes légales.
Depuis 2006, on observe une augmentation sensible des poursuites judiciaires, des opérations de filature et des gardes a vue en France.
Il y a actuellement près de 1.200 prisonniers politiques dans les prisons françaises, et ce nombre s’accroît constamment.
Pourtant, ce qui se fait au nom de la guerre contre le terrorisme, n’a rien à voir avec l’objectif déclaré. Il s’agit en réalité d’une guerre contre des droits et des libertés fondamentales acquises au prix de grands sacrifices.

L’ANTIFASCISME, UN ENGAGEMENT LÉGITIME

Si les militants poursuivis ont fait le choix de lutter, ce n’est pas par plaisir mais par sens du devoir et par humanisme. La répression ne les empêchera pas de poursuivre un combat qu’ils considèrent comme légitime.
La France entretient des rapports politico-économiques privilégiés avec la Turquie .C’est par souci de ménager ces relations que la France répond aux exigences de l’Etat turc.
En réalité, au-delà du sort des 13 antifascistes originaires de Turquie, le procès politique dont il est ici question, a pour enjeu la sauvegarde voire la survie des droits et des libertés fondamentales dans la patrie des droits de l’homme.
Le peuple français qui a remporté de glorieuses luttes contre la tyrannie et contre le nazisme ne mérite sans doute pas un tel affront que celui de voir son pays collaborer avec un Etat fasciste.
D’autant que le juge chargé de l’affaire s’est rendu en Turquie pour recueillir des preuves à l’encontre des inculpés. Ce dernier a été jusqu’à intimider l’imprimeur du quotidien légal « Yürüyüs » à Istanbul !
En Turquie, la lutte pour la démocratie n’a jamais pu être anéantie, malgré les juntes militaires, la torture, les exécutions extrajudiciaires, les disparitions politiques et les massacres. Et voilà que l’Etat français se met à encourager nos bourreaux dans notre pays d’origine.
Nous pensons que les magistrats qui agissent au nom de la France n’ont pas à jouer ce rôle infâme et à rendre ainsi la population française complice de leurs agissements.
Quoiqu’il advienne de nous, nous continuerons à défendre nos droits, dont les libertés d’expression et d’association, aux côtés du peuple français.

A ceux qui, en France, veulent nous bâillonner, nous demandons :
Est-ce un crime en France que d’être antifasciste ?
Est-ce un crime en France que de dénoncer les crimes de l’Etat fasciste qui sévit en Turquie ?
Nous exigeons de la part des tribunaux français :
- La fin de leur collaboration avec le régime répressif en Turquie au nom des intérêts économiques qui lient les deux pays.
- L’annulation de l’instruction visant nos camarades et leur libération
- La fin des poursuites contre les révolutionnaires anatoliens sur le territoire français
- L’arrêt de l’utilisation de la loi anti-terroriste contre les militants politiques
- La libération de tous les détenus politiques

Résister contre le fascisme n’est pas un crime

Liberté pour Ilker et Sefik


Comité des libertés - France
comitedeslibertes@gmail.com

lundi 6 avril 2009

La fermeture négociée d’un média kurde

C’était dans l’air. Il semble bien que la nomination au poste de secrétaire général de l’OTAN de l’ancien premier ministre danois, Anders Fogh Rasmussen, ait été négociée en échange de mesures à prendre à l’encontre de Roj TV. C’est en tout cas ce que l’on peut déduire des paroles rapportées par la presse turque lors du dernier sommet qui se tenait à İstanbul : « Tout d’abord, on est en train d’enquêter pour savoir s'il y a un lien économique entre Roj TV et l’organisation terroriste PKK. On cherche à savoir si les émissions de Roj TV font de l’incitation au terrorisme ou pas. Si l’on réunit assez de preuves, nous ferons notre possible pour fermer la chaîne mais dans le cadre des lois danoises. » [Radikal]
C’est aussi la première raison rapportée par Hürriyet avant l’histoire des caricatures [Hürriyet]. Le quotidien faisait mention de la présence du Parquet et d’officiels danois dès le 31 mars au sujet de poursuites à entamer en échange d’un soutien à la candidature de Rasmussen [Hürriyet].
Il y a deux jours, la presse pro-kurde parlait, quant à elle, de chantage exercé de la part du premier ministre turc, Recep Tayyip Erdoğan, devant un parterre de journalistes. Ce dernier mettant en avant son entrevue quatre ans plus tôt avec le premier ministre danois, sa requête non rencontrée pour faire fermer Roj TV et, par conséquent, l’avis négatif qu’il avait de la candidature en question. [Yeni Özgür Politika]
On peut donc s’attendre à de futures procédures judiciaires visant à démettre la chaîne de sa licence danoise. Il faut savoir que cet intense ballet diplomatique a déjà mené la chaîne à des sanctions pénales, notamment en Belgique où elle a été astreinte à 4 millions d’euro l’année passée par le ministère des finances [Radikal]. En effet, si son antenne émet depuis le Danemark, ses studios se situent à quelques kilomètres de Bruxelles et des institutions européennes.

Erdοğan et Rasmussen (photo : Radikal)

On parle beaucoup du "choc ressenti" par l’AKP, et à travers lui, la Turquie, eu égard aux caricatures danoises. C’est fort bien méconnaître les enjeux de ce pays. Que pèse véritablement cette anecdote face à la question kurde ? Le média c’est l’opinion et l’opinion c’est l’élection. Or, si l’on retient ce qui est en quelque sorte l’équation de Chomsky, que constate-t-on au Kurdistan ? Une débacle électorale comme l’AKP n’en avait plus connue depuis plusieurs années, renforcée sans doute par la faiblesse du vote utile des municipales (contrairement aux législatives). Or, personne n’ignore que Roj TV offre une tribune de choix pour les candidats DTP et diffuse abondamment leurs interviews, meetings et discours. L’indépendance médiatique, on le sait, n’est pas trop la tasse de thé d’Ankara (cf : ancien topic à ce propos). C'est donc bien à cette aune qu'il faut comprendre l’ouverture d’un média en langue kurde sur un canal public (topic de Newroz) et ces nouvelles manoeuvres.
En défendant sa position à propos des caricatures, Rasmussen était donc venu défendre la liberté d’expression à İstanbul… [La Libre Belgique].

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dimanche 5 avril 2009

L'école des fans

Si vous vous demandez pourquoi les militants de Savaş Karşıtları [pacifistes et anti-militaristes] se font attaquer par la foule lorsqu’ils manifestent en plein centre d’İstanbul, pourquoi beaucoup de Turcs se mettent au garde-à-vous lorsqu’ils entendent un air patriotique ou tout simplement pourquoi vous ne pouvez aborder certains sujets avec des kémalistes, la vidéo suivante peut vous apporter quelques éléments de réponse. Une réponse qui pourrait se résumer en un mot : conditionnement.

Vous connaissiez sans doute la petite Bismillah évoquant les Juifs comme des singes et des porcs à la présentatrice d’une chaîne saoudienne. Vous vous rappellez peut-être de la petite écolière turque, juste et travailleuse qui doit aimer sa nation plus que sa propre nature. Vous connaîtrez désormais la petite Suğra vociférant l’hymne national. La vidéo fait sensation chez le nationaliste lambda. Quand le patriotisme concurrence le bigotisme :


Et tout le monde de pleurer ému par une programmation si fiable et si efficace. La dame en peignoire conclut par un « c’est une bonne fille ».
Le texte de l’hymne national en soi ne réserve pas de surprise : race de héros, sang versé, martyrs morts pour la patrie, etc. Des ingrédients maintes fois éprouvés. Son intérêt littéraire se classe donc un cran en-dessous de Bambi, toute la beauté poétique en moins. Pour ceux que ça intéresse vraiment, c’est l’histoire d’un narrateur qui réprimande avec amour un drapeau qui flotte trop vigoureusement dans le vent… Qu’on le croit ou pas, le texte aurait remporté une compétition opposant 724 récits (wiki pour les sceptiques). On n’ose imaginer l’originalité des 723 autres…

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vendredi 3 avril 2009

Muharrem Cengiz, guitariste du Grup Yorum, a été arrêté !

Ci-dessous, le communiqué du Grup Yorum sur l'arrestation de l'un de ses guitaristes

Muharrem Cengiz : 2e à gauche à l’arrière-scène

Notre camarade guitariste Muharrem Cengiz avait été arrêté en 2004 et avait purgé plusieurs mois de prison pour des raisons les plus ridicules (*). Il avait ensuite été libéré. La Cour de cassation vient de confirmer sa condamnation. Il vient d’être arrêté et conduit en prison.

La Turquie est un pays où l’on peut être arrêté pour des motifs bidon au moment où on s’attend le moins et où l’on peut être maintenu en détention pendant des années. Dans un pays où les droits élémentaires sont bafoués, on ne peut parler de justice ! L’arrestation et l’incarcération de Muharrem Cengiz constituent un nouvel épisode dans l’injustice qui sévit en Turquie.

Alors que ceux qui pillent la Turquie, ceux qui ont fait de ce pays un vivier de corruption, ceux qui servent ce pays aux impérialistes sur un plateau doré, ceux qui torturent et assassinent se pavanent allègrement, Muharrem Cengiz a été arrêté par 15 à 20 policiers, a été battu et torturé en garde à vue !

Les valeurs défendues par Muharrem Cengiz et par Grup Yorum sont celles qui mettront fin à ce système qui sème exploitation et torture. Ce sont des valeurs intolérables pour les tyrans. Depuis 1985, l’année qui vit la naissance de notre Grup Yorum, nous subissons la répression, les gardes à vues, la censure, les détentions arbitraires, la torture, de longues captivités, l’exil... toutes ces persécutions ont pour motif la peur. Mais toutes ces persécutions sont vaines ! Ceux qui rêvent de voir notre voix s’éteindre, ceux qui croient que la prison empêchera notre marche vers des lendemains libres, armés de nos notes de musiques et de mélodies, se trompent et sont voués à la défaite.

Ils ne tairont pas notre infatigable devise « Les chansons ne se tairont pas, les halay (**) se poursuivront » !

Nous condamnons l’arrestation de notre camarade, membre de notre groupe Muharrem Cengiz, les sévices exercés sur lui et la confiscation de sa liberté.

Nous demandons la fin de la répression contre notre groupe.

Et nous appelons toutes celles et ceux qui, en Turquie, défendent les règles du droit et la justice, à protester contre l’arrestation illégale de Muharrem Cengiz.

Les chansons ne se tairont pas. Les halay se poursuivront !
Notre voix ne s’éteindra jamais !

Grup Yorum
Le 26 mars 2009


(*) En 2004, Muharrem Cengiz avait dû également comparaître devant une Cour de sûreté de l’Etat à Istanbul pour avoir publié en 2002 plusieurs articles dont un poème du poète chilien Pablo Neruda, intitulé « Chanson aux mères qui ont perdu leur fils » (nom original: Chant aux mères des miliciens morts). Il était alors le propriétaire de la revue artistique Kültür, Sanat Yasaminda Tavir (Attitude dans la vie culturelle et artistique). Reporters Sans Frontière. Rapport annuel 2004.

(**). Danse populaire d’origine paysanne, le halay est une farandole anatolienne omniprésente dans le patrimoine culturel des mouvements de gauche.

jeudi 2 avril 2009

Petitio Principii

Pour rebondir sur l'une des assertions d'Abdullah Gül dans l'interview précédente, voici une collection d'arguments fallacieux très en vogue en Turquie. Tantôt tirant sur la pétition de principe, tantôt sur le simple argument d'autorité, ils n'en sont pas moins affirmés avec la même crédulité que "le ciel est bleu" ou "l'eau est mouillée".
On ne rit pas. Beaucoup de gens prennent certaines de ces assertions très au sérieux. Au moins à partir de la quatrième ligne, et à commencer par le Président de la République...

prémisse A

prémisse B

conclusion

un être humain est un bipède

une poule est un bipède

un être humain est une poule

une chose rare est chère

un ordinateur bon marché est rare

un ordinateur bon marché est cher

si la quantité de gruyère croît, la quantité de trous croît

si la quantité de trous croît, la quantité de gruyère décroît

si la quantité de gruyère croît, la quantité de gruyère décroît

un raciste est quelqu’un qui établit une différence entre les origines des gens

revendiquer sa kurdité c’est établir une différence entre les origines des gens

quelqu’un qui revendique sa kurdité est un raciste

une organisation terroriste est une organisation illégale

le PKK* est une organisation illégale

le PKK est une organisation terroriste

un Turc est musulman

un Kurde est musulman

un Kurde est un Turc

des langues parentes ont un vocabulaire commun

gül/gul signifient “la rose” en turc et en kurde

le kurde vient du turc

quelqu’un qui commet un crime d’honneur est un barbare

des crimes d’honneur sont commis chez les Kurdes

les Kurdes sont des barbares

un primitif est quelqu’un qui ne sait pas lire et écrire

l’analphabétisme est élevé chez les Kurdes

les Kurdes sont des primitifs

un criminel est quelqu’un reconnu coupable devant une cour

Leyla Zana* a été reconnue coupable devant une cour

Leyla Zana est une criminelle

un traître est quelqu’un qui prend son propre pays pour cible

Orhan Pamuk*, un Turc, a pris pour cible la Turquie

Orhan Pamuk est un traître

etc

etc

etc


* d'autres organisations ou personnes peuvent être prises en exemple

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